Jouer avec le feu - feat Ophélia

Il n'est pas encore très tard, même si le soleil est couché depuis un bon moment. Rien d'urgent ne l'attend, ce soir, et Dmitri a bien besoin de décompresser un peu. De se vider la tête, de se changer les idées, bref, de voir autre chose que son appartement. De frissonner un peu, peut-être, et pourquoi pas de rentrer accompagné. Une chouette nuit en perspective, il l'espère. Alors, ce n'est pas par hasard qu'il a jeté son dévolu sur le One Night Shot. Le club est sympa, l'alcool pas trop mauvais, et les hôtesses sont, en général, plutôt agréables à regarder. Le Nord du Bronx est son terrain de jeu, de plus… bref, tout pour une nuit sans prise de tête.

Et puis, ce soir, il est quasiment sûr qu'il y aura Ophélia. La jolie, pétillante, dangereuse Ophélia. Oh, elle n'est pas très impressionnante, même s'il a déjà remarqué qu'elle n'a pas sa langue dans sa poche, mais c'est plutôt qui elle est qui s'avère dangereux. Et attirant. Quel membre du gang, après tout, pourrait ignorer l'identité de la fille de leur plus grand ennemi ? Ophélia, serveuse à ses heures perdues, trophée en devenir. Il les a écoutées, les rumeurs, Dmitri : déjà parce que son boulot, c'est aussi de se tenir informé, et ensuite parce que c'est toujours intéressant. Démêler le vrai du faux est souvent un challenge, mais il pense avoir bien cerné le personnage. Il verra bien, quoi qu'il en soit : qu'est-ce qu'il risque, à jouer avec le feu ?

La Lamborghini noire se glisse sans effort sur une place libre. Les petites frappes du coin savent à qui elle appartient, aussi Dmitri ne s'inquiète pas trop pour la sécurité de sa voiture, malgré son côté tape-à-l'œil. Il ne peut s'en défendre : il aime afficher son argent. A chaque embouteillage, il peste de ne pas avoir une moto, mais… la Lamborghini, c'est lui. C'est son style. Gosse de riche un jour, gosse de riche toujours, sans doute. Il n'en sait rien, mais quoi qu'il en soit, il n'a jamais pu se résoudre à adopter une voiture plus passe-partout, sauf lorsqu'il travaille pour le compte du gang, évidemment. Cela serait particulièrement stupide d'associer Zeb le trafiquant d'armes à la voiture m'as-tu-vu de Dmitri. Mais ce soir, elle fera parfaitement l'affaire, sa Lambo. Une petite tape amicale sur le capot, un verrouillage centralisé par habitude plus que par réelle inquiétude, et Dmitri pénètre dans le club. Il y a ses habitudes, le videur le laisse entrer sans problème – laisser de l'argent aide à ouvrir les portes – et le jeune russe se dirige vers le bar, au son d'une musique dont les basses pulsent fortement. Il ne s'installe pas tout de suite, pourtant, le temps de repérer sa pr… enfin, la belle qui aura le plaisir de sa conversation ce soir. Même si elle bosse. Il espère un peu, Dmitri, qu'elle ne finit pas trop tard : du boulot l'attend demain et son boss a beau l'apprécier, on ne tergiverse pas avec les affaires du gang. Peu importe, il verra bien.

 Elle est là, la petite Ophélia, affairée à servir un client. Jeune, trop jeune pour lui diraient certains : ça tombe bien, Dmitri n'écoute pas beaucoup les conseils, sauf lorsque ce sont les siens. Et encore. C'est donc elle, la jeune femme dont le père fait frémir les gentils policiers au fond de leur lit ? Mouais. Il ignore si elle est surveillée, en même temps, si l'en on croit les rumeurs, les rapports avec son père ne sont pas au beau fixe, et Dmitri aurait tendance à y croire : pourquoi elle bosserait ici, sinon ? "Добрый вечер!"(Bonsoir) Lance-t-il à la jeune femme en s'installant, ses yeux clairs la détaillant sans qu'il ne s'en cache vraiment. "Une bière, s'il vous plait." De la vodka serait bien trop cliché, et il n'a pas l'intention de s'enivrer, ce soir. Enfin, pas avant quelques heures, au moins !